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Articles de presse

“Ils meurent de faim”, selon le chef de village

Kompong Speu

“Ils meurent de faim”, selon le chef de village

 

Village Tameun, province de Kompong Speu - Le convoi s’immobilise à l’entrée du village sous les acclamations des habitants. Les passagers déchargent les six voitures de leur cargaison : 25 kilos de riz, 6 bouteilles de sauce de soja et quelques boîtes de nouilles. Cette livraison exceptionnelle est la réponse improvisée de la Licadho, du bureau des droits de l’Homme des Nations unies et de quelques autres ONG au cri d’alarme des habitants de ce village où sont récemment mortes cinq personnes. La semaine dernière, Radio Free Asia avait rapporté qu’elles étaient toutes décédées à cause de la famine qui frappe la région. Une affirmation démentie vendredi par le Premier ministre, selon qui ces personnes sont mortes de vieillesse, de maladie ou par suicide.

En s’installant devant la cargaison de vivres fraîchement débarqués, Hut, veuve de 71 ans, ne peut s’empêcher de penser à son mari décédé un mois plus tôt. “Bien sûr qu’il était vieux, mais il n’est pas mort de vieillesse, assure-t-elle. Il est mort de faim. Il travaillait comme saisonnier dans les rizières et ne gagnait plus rien à cause de la sécheresse. On n’avait rien à manger. Il devenait de plus en plus faible et est tombé malade. Quelques jours après, il était mort”, se souvient-elle les larmes aux yeux. Sa voisine, elle, a perdu son fils dans de tragiques circonstances : le garçon, âgé de 13 ans, s’est pendu pendant qu’elle travaillait à la rizière. “Il était très affecté par notre situation et m’a souvent fait comprendre qu’il ne voulait pas vivre dans ce monde de famine. Je ne gagne que 2 000 riels (0,40 €) par jour, ce qui me permet à peine d’acheter un kilo de riz pour les six membres de ma famille. Rien de plus. Ce jour-là, mon fils est venu me trouver aux champs pour me dire qu’il avait faim. Je n’avais pas encore fini ma journée, et je lui ai dit que je n’avais pas de quoi acheter du riz. Un peu plus tard, un voisin est venu me trouver pour m’apprendre qu’il s’était pendu à la maison”.

Le chef du village, Phok Sun, est accablé par la misère de ses administrés. Cela fait trois ans que la sécheresse brûle les récoltes. Du jamais vu, selon lui. Sur les 118 familles du village, 38 souffriraient de famine chaque année. Il a déjà alerté ses supérieurs, sans résultat. Aussi la semaine dernière a-t-il décidé de témoigner à la radio. “J’ai osé évoquer le problème parce que je ne me résous pas à voir mes villageois mourir devant moi”, explique-t-il. Et c’est peu dire que l’intervention du Premier ministre vendredi n’a pas répondu à ses attentes : “Cela fait 15 ans que je suis le chef de ce village. C’est la première fois que des habitants meurent ainsi sans avoir mangé pendant plusieurs jours. Je vous jure qu’ils n’ont pas de quoi se nourrir. Ils sont malades et meurent les uns après les autres. Regardez-les bien : ils sont pâles et faibles”, déclare-t-il avant d’inviter les responsables du gouvernement à venir sur place s’ils ont encore des doutes. Sa requête est simple : “Aidez-nous à construire des canaux d’irrigation et des puits!” La sécheresse a en outre aggravé un autre mal dont souffrent les habitants du village au point de les obliger à vendre leurs maigres récoltes : l’endettement.

Entouré de femmes pâles et visiblement affaiblies, Theara, médecin de la Licadho, se dit très préoccupé par la santé de la plupart des villageois. “Ils souffrent de malnutrition. Leurs anticorps ne les protègent plus contre certains virus et ils tombent malades”, s’alarme-t-il.

Chheang Bopha

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