Religion
“La quête n'est pas le but principal du bouddhisme”
Que les bonzes cessent de faire la quête sur les marchés et les lieux de loisir : c’est une des huit résolutions arrêtées la semaine dernière à l’issue des deux jours du 14e congrès national des bonzes. Le grand symposium de la religion d’Etat, avec ses 121 délégués, moines et fonctionnaires du culte venus des quatre coins du pays, a ainsi clos ses débats avec son habituel Sang Prâkas, le décret détaillé qui vise à instaurer davantage de rigueur sous les robes.
Outre l’interdiction de quêter dans des lieux inadéquats, le décret insiste sur l’importance d’une formation aux tâches administratives pour les chefs des bonzes, et ce afin d’éviter ces conflits, parfois graves, qui ont perturbé récemment la vie de certaines pagodes. Autre vœu pieux, la mise hors d’état de nuire des faux bonzes, qui revêtent l’habit le temps d’abuser de la charité des fidèles : les chefs de pagode et les fonctionnaires ont toute latitude pour confondre les escrocs et les traîner au poste de police le plus proche, avant que soient lancés contre eux des poursuites pour “port d’uniforme sans autorisation”. Les autres points concernent notamment l’affichage du bouddhisme dans l’enseignement scolaire, telle la présence des bonzes à l’école ou encore la réforme de l’Université bouddhique. Elément à relever, la proposition de loi du ministère des Cultes reprise par le gouvernement visant à garantir la protection du bouddhisme du Petit Véhicule.
Tirant les enseignements du congrès, le Vénérable Long Kim Leang, directeur adjoint du cabinet de Tep Vong, le chef suprême de l’ordre Mohanikay, revient sur ce point primordial de la bienséance lors de la sollicitation de l’aumône. “La quête d’argent ou de biens n’est pas le but principal du bouddhisme. La pagode ne gagne rien à une attitude qui ne sert que l’intérêt personnel”, énonce le Vénérable, qui rappelle que la question de la mendicité sur les marchés et les lieux de détente a déjà fait l’objet d’une résolution au cours du 12e congrès. Si les énoncés du Sang Prâkas s’appliquent, insiste-t-il, la rigueur retrouvée permettra de rehausser l’image du bouddhisme et d’isoler plus facilement les imposteurs qui, dissimulés sous l’habit, profitent du relâchement général.
“Quêter sur les marchés est contraire au bouddhisme, car en cas d’affluence, les bonzes touchent inévitablement les gens, notamment les femmes”, confirme un respectable achar de 78 ans à la pagode Langka, qui se félicite de ce Sang Prâkas. L’atmosphère mercantile et empressée du marché empêche en outre l’aumône de se dérouler dans les conditions de piété requises, insiste-t-il. Evoquant le passé, le vieil homme croit se souvenir qu’au temps du Sangkum Reastr Niyum, les bonzes respectaient à la lettre la règle bouddhique. Aujourd’hui, déplore-t-il, certains se distraient en se rendant aux concerts, en se promenant au bord du fleuve voire même en regardant le football. “Ces gens-là font baisser la valeur du bouddhisme, et les fidèles ne respectent plus guère la pagode”, constate-t-il, se remémorant une fois de plus le temps où pas un bonze ne traînait après 9 heures du soir.
Pour répondre à ce type d’inquiétudes, le ministre des Cultes Khun Haing a fait part lors de la clôture du congrès de son optimisme quant à l’application du Sang Prâkas, et a promis d’œuvrer en collaboration avec les communautés religieuses pour maintenir le prestige du bouddhisme dans le royaume.
Ung Chamrœun |