Malgré leur handicap, ils ne se sont jamais résolus
à mendier. Et pourtant, la semaine dernière, les membres
de lAssociation pour le salut des invalides cambodgiens (ASIC)
ont accepté denvoyer une délégation à
Phnom Penh pour alerter les autorités sur leurs difficultés
actuelles. Créée en lan 2000 dans la commune
de Treng Troyin,province de Kompong Speu, lassociation regroupe
des familles dinvalides de guerre. Objectif de son président,
Touch Suly, âgé de 47 ans, qui aperdu sa jambe
droite sur un champ de bataille en 1982 : donner à ces handicapéset
à leurs familles les moyens dassurer leur subsistance
en exploitant un lopin de terre. Pour cela, Touch Suly disposait
dun atout de taille.Les autorités provinciales, sensibles
à cette volonté dindépendance, lui avaient
accordé gratuitement des terrains. Si bien que 160 familles,
attiréespar cette aubaine, ont rejoint lASIC.
Malheureusement, les difficultés saccumulent. Essentiellement
parce que cette communauté ne dispose pas des moyens nécessaires
à la culture ces terres. Ni bufs, ni charrettes. Et
au cours des derniers mois, la situation na fait que saggraver.
Quelquefois, nous navons rien à manger. Nous
sommes obligés de nous nourrir de manioc, ce qui met en péril
notre santé. La plupart du temps, nous devons nous contenter
de riz agrémenté de prahôcou de sel. Ce nest
pas très différent du régime de Pol Pot,
raconte le président.
Ma vie est si triste que je nose en parler à
personne, renchérit Sen Somrong, 47 ans. La société
ne nous a pas mis à lécart etmais elle ne répond
pas à nos besoins, lâche-t-il avec un brin dironie
dans la voix. A ses côtés, un de ses amis, vêtu
en civil, dit détesterdésormais les uniformes
militaires, car la guerre a été du temps de
perdu.Je ne suis pas né handicapé et,
à cause de la guerre, je dois vivre avec une jambe en moins.
Par le passé, ils ont déjà reçu des
aides. En 2000, le roi leur a accordé 400 tonnes de riz.
Lannée suivante, 400 tôles dezinc ont été
données à leur village. En 2002, le vénérable
Tep Vong leura fait parvenir du riz , des krama et des moustiquaires.
Des aides bienvenues mais ponctuelles. Que veulent-ils aujourdhui?
Dabord des bufs pour pouvoir travailler leurs terres.
Mais aussi des écoles et des centres de soins pour assurer
un avenir à leurs enfants. En espérant être
entendus, ces handicapés viennent chercher à Phnom
Penh une certitude. Celle que, dans la paix retrouvée,ils
ne seront pas abandonnés
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