Un examen d’alphabétisation à la veille de la
Journée mondiale de la lutte contre l’illetrisme
Le surveillant appelle les noms des candidats les uns après
les autres. La scène ressemblerait à n’importe
quelle session d’examens scolaires si ce n’est que les
élèves appelés à bûcher sont âgés
de 11 à 55 ans et passent un test réservé aux
classes d’alphabétisation.
Hier, au lycée Chaktomuk, 115 candidats, venus de 13 villes
et provinces, dont certains envoyés par des ONG, ont durant
deux heures noirci leur copie, passant des QCM aux exercices de
mathématiques de niveau quatrième. “Nous organisons
cet examen depuis trois ans mais c’est la première
fois cette année que les meilleurs éléments
(ceux qui auront plus de la moyenne) seront récompensés
par des cadeaux - vélo, radio, cartable, cahiers et argent
- et que les épreuves sont ouvertes aux élèves
de provinces éloignées de la capitale”, explique
In Thé, directeur du département de l’éducation
non formelle au ministère. Cet élargissement géographique
a été permis grâce à la collaboration
d’ONG, qui ont imprimé leurs noms sur les tenues des
inspecteurs de l’examen - Unicef, Unesco, Oxfam - pour rappeler
leur participation aux opérations.
La correction des copies devait être effectuée dans
la foulée, afin que les résultats puissent être
proclamés aujourd’hui au Stade Olympique, où
est célébrée la Journée mondiale de
la lutte contre l’analphabétisme. A cette occasion,
Hun Sen avait appelé lundi les établissements publiques
à se pencher sur le thème de “l’analphabétisme,
clé du développement”.
Les années passées, le taux de réussite à
l’examen avoisinait les 60-70%, selon In Thé, qui regrette
qu’aucune nouvelle donnée ne soit disponible sur l’analphabétisme
: “Le dernier recensement remonte à cinq ans et l’Etat
n’a pu en organiser de nouveau faute de budget. Mais nous
comptons solliciter l’aide d’organismes internationaux
pour mener une nouvelle étude dans deux ans.” D’après
les chiffres de son département, le pays compte 63% d’analphabètes
(36,3% d’analphabètes complets + 26,6% de semi-lettrés).
Nhim Sophal
“Avant je ne savais pas tenir un stylo!”
C’est son mari qui gardait les enfants pendant qu’elle
se concentrait sur sa copie. Rien n’aurait pu empêcher
Tit Sivorn de se rendre hier à son examen, pas même
son ventre rond de bientôt neuf mois de grossesse. “J’ai
toujours regretté de ne pas avoir été à
l’école. Mais je n’en avais pas les moyens. C’est
pourquoi je suis contente de rattraper aujourd’hui mon retard.”
Depuis quatre mois, cette mère de cinq enfants de l’arrondissement
de Meanchey suivait les cours d’alphabétisation de
l’ONG Hagar. A la sortie de la salle, la joie effaçait
la fatigue : “Je crois que je serai parmi ceux qui auront
la moyenne car j’ai pu répondre à presque toutes
les questions!”, s’enthousiasmait-elle. “Avant,
je ne savais même pas comment tenir un stylo! Aujourd’hui,
je peux lire le journal, et compte bien enseigner les rudiments
que je connais à mes enfants.” NS
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